Le 24 Aout 1944 à Chateauvillain
Mes amis, il faisait aussi chaud, l'atmosphère lourd comme aujourd'hui.
Le temps coulait au ralentit, persiennes tirées.
Avec mon amie Christiane, échevelées, nous revenions, en bicyclette de la "Sablière" de notre baignade.. ou nous avions appris à nager. Nous avions 15 ans.
Sur un mur communal, près de chez mes parents un placard grillagé avait été installé par la commune pour y afficher les obligations et autres publicités municipales. Nous aimions beaucoup lire ce tableau d'affichage .
Ce soir là, un "Avis" écrit en lettre Noire et Gothique prévenait :
"De nombreux faits de résistance ayant été commis dernièrement dans la commune, la "Feld" gendarmerie n'hésitera pas à mettre le pays à feux et à sang au moindre nouveau délit "
Christiane et moi étions sidérées !
Nous étions scotchées devant cet affichage !
Maman vient au devant de nous et dit à Christiane " vite rentre... rentre chez toi"
Sans rien savoir, l'air était tendu.
Il faut vous dire que nous vivions depuis la défaite de 1940, sous le joug de la Botte Allemande, c'était le temps de l'occupation.. La "Croix Gammée" flottait au balcon de la plus belle maison du village... Nous devions être rentré pour "le couvre feux", les bistrots et les catés fermés à 20 hrs .
Un groupe de 6 hommes passait, chaque soir, fusil à l'épaule pour vérifier si aucune lumière ne passait. Ils tapaient à coup de cross, contre la porte s'ils entendaient du bruit !
Il n'était pas bon, à cette époque d'écouter Radio Londres !
Donc ce 24 Aout 1944, en fin d'après midi, ma grand mère, qui habitait rue de Penthièvre à vue descendre "en tirailleur" de la rue de Chaumont des soldats Allemands, arme au poing. Venant de Chaumont, ce camion aurait été la cible, à la hauteur de "La Tuilerie" de tirs, venant de l'autre côté de la voie ferrée. Raisons de cette descente de la rue de Chaumont en "tirailleurs" (?)
Ils sont arrivés au café de " La Providence" tenu à cette époque par Monsieur et Madame Deveau, où un groupe d'amis jouait aux cartes. ...
Le couvre feu était dépassé !!
Manu militari.. ils furent emmenés au Parc.. D'autres civils furent emmenés..
Le long du chemin plusieurs personnes qui étaient devant leur porte furent tuées à bout portant : Monsieur Millière. habitant au coin de la rue Thiers. Puis, le grand père du Magasin de la Ruche Moderne.. Monsieur Morin, huissier de Justice qui fermait sa porte de cave.
De nombreux civils étaient présents, Madame Hue, (veuve d'un ami du Général Frossard, hébergée avec sa fille et son fils, dans la maison de la mère du général) Cette dame qui venait faire une partie du jardin où nous habitions, était devenue amie avec ma mère.
Elle nous a raconté, comment ils avaient été pris en otage devant leur porte, l'horreur qui fit suite... restée toute la nuit à genoux et prier..
Ils furent I7 hommes à perdre la vie, Un seul fut sauf, tombé le premier ? Il resta toute la nuit sans bouger sous l'amoncellement de corps sans vie.
Il y avait les clients du café, d'autres pris en descendant la rue du Parc !
Chaque année une Cérémonie Commémorative à lieu....
Celle-ci vient de se terminer...
Et, je viens d'avoir la gentille visite de ma petite voisine Marie Agnès Douché-Gozzi qui est Porte Drapeau.. Sachant que je ne peux plus me déplacer elle est venue me dire que comme tous les ans, les autorités étaient présentes : Madame le Préfet, Militaires et Gendarmes et nombreuse population !
Le temps passe, mais nous n'oublions pas !